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Laisse-moi pleurer, Vue d’installation n°1, Capsule Galerie, Le Lieu, Rennes, France.



Laisse-moi pleurer, Vue d’installation n°2, Capsule Galerie, Le Lieu, Rennes, France.



Laisse-moi pleurer, Vue d’installation n°3, Capsule Galerie, Le Lieu, Rennes, France.



Laisse-moi pleurer
Œuvre sonore, Installation, composée de 18 hirondelles en faïence et céramique
2023


« J’ouvre la fenêtre, et j’entends que tu n’existes plus.
Sans toi, le printemps reviendra-t-il ?
Il paraît que nous sommes entrés dans une nouvelle ère, remplie de ton absence.
Ah… Laisse-moi pleurer. »1



En rejouant dans un jeu d’ombre et sonore la présence de l’oiseau disparu, Lucas Andreac nous invite, avec poésie, à porter notre attention sur le vivant. Porte-bonheur universel, l’hirondelle incarne l’arrivée du printemps et le renouvellement de la vie. Si bien que pour recréer sa présence, il est coutume de décorer les murs de sa maison avec une hirondelle en faïence. Victime des transformations de notre environnement, l’hirondelle semble désormais être devenu le témoin visuel et sonore de l’extinction des espèces2 . Si ses chants doivent être écoutés, leurs absences aussi, affirme l’artiste.

Il parait que nous sommes entrés dans une nouvelle ère, faite de silence. Nous l’appelons Phonocène. Le Phonocène, « c’est ne pas oublier que si la terre gronde et grince, elle chante également. C’est ne pas oublier non plus que ces chants sont en train de disparaître, mais qu’ils disparaîtront d’autant plus si on n’y prête pas attention. Et que disparaîtront avec eux de multiples manières d’habiter la terre, des inventions de vie, des compositions, des partitions mélodiques, des appropriations délicates, des manières d’être et des importances »3.


Hirondelle qui vient de la nue orageuse
Hirondelle fidèle, où vas-tu ? dis-le-moi.
Quelle brise t'emporte, errante voyageuse ?
Écoute, je voudrais m'en aller avec toi,

Bien loin, bien loin d'ici, vers d'immenses rivages,
Vers de grands rochers nus, des grèves, des déserts,
Dans l'inconnu muet, ou bien vers d'autres âges,
Vers les astres errants qui roulent dans les airs.

Ah ! laisse-moi pleurer, pleurer, quand de tes ailes
Tu rases l'herbe verte et qu'aux profonds concerts
Des forêts et des vents tu réponds des tourelles,
Avec ta rauque voix, mon doux oiseau des mers.

Hirondelle aux yeux noirs, hirondelle, je t'aime !
Je ne sais quel écho par toi m'est apporté
Des rivages lointains ; pour vivre, loi suprême,
Il me faut, comme à toi, l'air et la liberté.

Louise Michel, Chansons d’oiseaux, Les hirondelles, avril 1861.



1. Mots de l’artiste.
2. Selon l’Organisation Mondiale de la Protection de l’Environnement (OMPE) 40% des hirondelles ont disparu en deux décennies. Pour cause, la disparition de son habitat naturel, l’utilisation massive de pesticide qui entraine l’élimination des insectes et le changement climatique.
3. DESPRET, Vinciane. - Habiter en oiseau - Actes Sud, Paris, 2019, p.181.